jeudi 7 mai 2015

Revenu inconditionnel

J’entends de plus en plus parler du revenu de base inconditionnel en ce moment. Apparemment, c’est une idée qui fait son chemin, même au sein des entrepreneurs de la Sillicon Valley.

Le principe est que quelque soit votre âge et votre activité, vous êtes gratifié d’un revenu inconditionnel vous permettant de vous loger, de vous nourrir et de vous vêtir. Le but est que ce revenu puisse être suffisant pour vivre décemment. Belle utopie, non ? Interrogeons nous sur les implications d’une telle idée.

Une société pensée autour du travail rémunéré

Tout d’abord, elle rend caduque la nécessité d’exercer une activité rémunérée pour vivre. Aujourd’hui, le moyen le plus évident pour vivre décemment est de travailler pour un employeur. Cela vous met dans une situation de dépendance vis à vis de celui-ci et nécessite que le travail que vous fournissez soit rentable. Dans le cas contraire, vous avez toutes les chances d’être licencié. Aujourd’hui, il est de plus en plus difficile de rendre votre activité rentable, car il semble qu’il soit toujours possible de trouver quelqu’un pouvant faire le même travail que vous, avec une meilleure qualité et moins cher. Cela peut même être une machine. Étant développeur informatique, je sais de quoi je parle…

Vous pouvez également être votre propre patron, en devenant travailleur indépendant ou en montant une entreprise avec d’autres personnes. Cela vous contraint également à être rentable et comporte plus de risques qu’exercer un emploi salarié.

Vous pouvez bénéficier du chômage et du RSA. Cependant, le premier est très limité dans le temps, et le second est une rémunération ridicule qui ne permet pas de vivre décemment. Tous deux et loin d’être inconditionnels.

Enfin, vous pouvez choisir une vie marginale, plus en rejet de la société ce qui complique vos interaction avec elle (je pense punk et squat, sans jugement de valeur et peu importe la forme que ça peut prendre).

La valeur travail est véritablement ancrée dans notre culture et beaucoup d’éléments dans notre vie en dépendent.

  • l’accession à la propriété nécessite d’avoir un CDI ou X années de bilan positif pour une entreprise ;
  • la location d’un logement exige a minima des revenus issus du travail ou un garant ;
  • l’accès au chômage est conditionné par une cotisation et un départ à l’initiative de l’employeur (au moins partiellement dans le cadre d’une rupture conventionnelle) ;
  • l’accès à une pension de retraite est conditionné par une période de cotisation de plus en plus longue.

Idée reçues

Avant de continuer, considérons les assertions ci-dessous :

  • Les chômeurs ne sont pas des fainéants. En majorité, ils sont au chômage parce qu’il n’y a pas assez de travail disponible ou accessible.
  • Votre travail n’est pas utile. Beaucoup des activités qui nous sembles nécessaires sont induites par notre société et ne sont pas primordiales. Demandez-vous si quelqu’un ira râler sur TF1 si vous faites grève demain. Dans mon cas, le monde ne s’arrêtera pas de tourner.
  • Le revenu d’un individu est loin de provenir systématiquement du travail. Aujourd’hui, les meilleures sources de revenu sont issues du capital. Désolé.

Imaginons maintenant ce qu’impliquerait le fait d’avoir un revenu minimal inconditionnel

Avec un revenu minimal inconditionnel, je peux choisir sans trop en souffrir d’abandonner mon activité rémunérée.

L’activité salariée devient volontaire et peut s’arrêter immédiatement à l’initiative de l’employé comme de l’employeur. Il n’y a pas de relation de dépendance par l’argent. Juste l’envie d’avancer.

J’ai la possibilité de changer d’activité, de me former, de créer ma propre activité ou de l’abandonner.

Il y a une garantie de solvabilité pour les loyers, les banques. Avec potentiellement un impact sur le prix de l’immobilier car le risque et les conséquences de loyers impayés sont extrêmement réduits.

Il devient possible de s’engager davantage dans le social, d’aider les gens.

Je peux retrouver ma créativité, plutôt que de la gâcher dans un travail qui n’a pas de sens.

La société peut se permettre la frugalité, pas de production pour la production, pas de croissance pour la croissance plus besoin de s’obstiner dans la quête de la performance.

Comment faire ?

Franchement, je ne vois pas… Comment financer si on génère moins de richesse ? Comment remplace-t-on le travail utile ? Quelle degré de mécanisation, d’automatisation ?

Aujourd’hui, le système centré sur le salaire est tellement ancré qu’il est difficile de répondre à ces questions. Alors je vais me contenter de vous renvoyer vers cet article.

Réserve ?

Peut-on baser une société sur le volontarisme ? Quid des travaux ennuyeux, durs ? Qui voudra les faire ? Qui voudra ou pourra les financer ? On parle d’augmenter le degré de mécanisation et d’automatisation : saura-t-on toujours en effectuer la maintenance ? Une telle société tient uniquement sur le fait que l’humain est de bonne volonté. C’est ambitieux.

Conclusion

Personnellement, cette idée de revenu inconditionnel me fait rêver. Mais avant de se concentrer sur le réalisme économique de cette proposition, il est nécessaire d’analyser le fonctionnement de notre société basée sur le salaire. Est-elle juste ? Est-elle viable ? Est-ce qu’elle fonctionne ? Sommes-nous heureux de vivre dans ce système ou sommes nous en train de nous voiler la face ?

Notre système génère actuellement une violence inouïe. On parle par exemple de terrorisme. Je ne pense pas que ce soit une conception radicale d’une religion qui génère le terrorisme. C’est une explosion de colère face à un système dans lequel l’exclusion est un facteur de fonctionnement. C’est bon maintenant, on peut arrêter ça.

Une fois le changement de point de vue effectué, les réponses techniques viendrons.